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La cité internationale de la gastronomie de lyon


 

Le samedi 19 octobre 2019, la Cité Internationale de la Gastronomie a ouvert ses portes dans un lieu emblématique de la ville de Lyon, le Grand Hôtel-Dieu. Histoire, santé, culture, goût : l’exposition permanente propose une ouverture sur la gastronomie et accompagne le public vers des questionnements sur les enjeux sociétaux auxquels nous faisons face en termes d’alimentation.


 


C’est dans le lieu historique de la ville de Lyon, le Grand-Hôtel Dieu qu’a ouvert en octobre 2019 la Cité Internationale de la Gastronomie. L’ouverture de cet espace entièrement dédié à la gastronomie et au patrimoine culinaire français s’explique par l’inscription du repas gastronomique des Français au patrimoine mondial de l’UNESCO en 2010. De plus, le choix de la ville de Lyon fait sens puisque cette dernière a gagné le titre de capitale mondiale de la gastronomie[1] en raison de ses nombreux chefs renommés tels que Paul Bocuse, de ses multiples restaurants étoilés, de ses prestigieux évènements tels que le Salon Mondial de la Restauration et de l’Hôtellerie (SIRHA) ou encore la Biennale Internationale du Goût. C’est en 1934 que le chef Curnonsky a désigné Lyon comme capitale de gastronomie en 1934.


Le grand Hôtel-Dieu de Lyon, ©Eric Cuvilier




L'HÔTEL-DIEU : HISTOIRE D'UN MONUMENT


L’Hôtel-Dieu est un bâtiment à part entière à l’histoire riche qui en dit long sur la ville de Lyon, mais aussi sur la médecine et l’architecture lyonnaise.

Tout commence au Moyen-Âge, après l’an mil, lorsqu’une congrégation religieuse de moines hospitaliers appelés les frères pontifes au 12e siècle construisirent un pont à l’emplacement actuel du pont de la Guillotière et qu’ils y établirent non loin un premier hôpital, l’Hôpital du Pont du Rhône. Ce dernier pouvait accueillir les voyageurs arrivant à Lyon, les pauvres, les indigents et à partir de 1309 des malades. Le premier bâtiment des frères pontifes était d’abord géré par l’Église. C’est en 1480 qu’il est vendu aux consuls de la ville qui détiennent le pouvoir municipal à Lyon. Ces derniers construisirent un nouvel hôpital, plus grand, à l’emplacement de l’actuelle chapelle, sous la forme d’une grande salle. En 1507, l’hôpital pris le nom d’Hôtel-Dieu de Notre-Dame de Pitié du pont du Rhône. L’hôpital accueillait désormais tous les malades, les femmes enceintes, les nouveau-nés et les enfants abandonnés. Une droguerie fut créée en 1527, un médecin et un barbier apportaient les soins aux malades. François Rabelais, écrivain humaniste qui séjournait alors à Lyon pour faire imprimer ses ouvrages, occupa le poste de médecin de l’Hôtel-Dieu de 1532 à 1535.

Depuis sa naissance, l’Hôtel-Dieu avait recours à la charité pour assurer les soins aux malades. En 1570, les consuls de la ville établirent une boucherie au nord de l’hôtel dont la location des différentes boutiques offrit de nouveaux revenus à l’Hôpital. En 1583, la gestion de l’Hôtel-Dieu passa entre les mains de six notables appelés recteurs qui étaient renouvelés tous les ans. Ces derniers apportèrent un important soutien financier et s’impliquèrent personnellement dans les soins promulgués aux malades.

En 1620, les recteurs décidèrent de construire un hôpital plus grand et plus adapté aux nouvelles technologies médicales. Ce nouvel hôpital, dans sa forme, s’inspira de l’Italie et notamment des modèles de Milan, de Parme, de Pavie ou de Plaisance puisqu’il se présentait (et encore aujourd’hui) en croix grecque avec quatre grandes salles de malades ouvertes sur une chapelle surmontée d’un dôme orné de stucs. C’est en raison de cette forme en croix grecque que l’on appelle cette partie de l’Hôtel-Dieu le Dôme des Quatre-rangs. Depuis leurs lits, les malades pouvaient voir la chapelle et suivre les offices quotidiens. Ce plan avait aussi un but sanitaire : les quatre salles permettaient de séparer les malades en fonction de leur sexe et de leur affection. Le dôme permettait aussi d’aspirer et d’évacuer les miasmes présents dans les salles. Une fois ce nouvel hôpital construit, l’ancien hôpital fut détruit pour laisser place à une chapelle baroque que nous pouvons encore admirer aujourd’hui.

Le siège de Lyon de 1793 causa de gros dégâts matériels à l’Hôtel-Dieu. La Révolution bouleversa les finances puisque les octrois municipaux furent supprimés et un impôt sur les biens immobiliers fut instauré. Face à cette crise, les recteurs de l’Hôtel-Dieu démissionnèrent. En 1802 l’Hôtel était géré par une administration commune : les Hospices Civils de Lyon. La façade envisagée par Soufflot fut terminée en 1841. Pour agrandir l’hôpital, comme cela était prévu dans le projet du 18e siècle, les Hospices Civiles achetèrent des propriétés rue de la Barre et rue de la Bellecordière. De plus, l’Hôtel-Dieu fit l’objet de changements visant à améliorer la circulation de l’air pour offrir un confort optimal aux malades. Cela s’effectua à la suite du courant hygiéniste de l’époque. En 1840, la grande boucherie datant du 16e siècle fut remplacée par un passage couvert accueillant de nombreuses boutiques de bijoux notamment.

L’architecte Tony Garnier proposa plusieurs projets pour l’Hôtel-Dieu. Il proposa d’abord de construire un hôtel des postes sur la façade de l’Hôtel-Dieu donnant sur le quai. Le reste serait détruit et remplacé par un ensemble immobilier qui financerait le nouvel hôpital de Grange-Blanche pensé par le maire de la ville, Edouard Herriot. Cependant, beaucoup de gens s’opposèrent au projet de Tony Garnier. Ces derniers parvinrent à faire inscrire au titre des Monuments historiques la chapelle de l’Hôtel-Dieu et des parties architecturales du 17e et 18e siècle. À la fin de la première guerre mondiale, le débat repris. Tony Garnier proposa un autre projet qui ne prendra finalement pas vie. C’est un autre hôpital, celui de la Charité qui paya les frais de la politique de modernisation d’Edouard

Herriot. La Charité fut détruite en 1934. Le clocher est le seul élément architectural épargné afin de garder en mémoire ce lieu historique. L’Hôtel-Dieu fut donc sauvegardé. Il fit l’objet de quelques transformations pour améliorer les conditions d’hygiène et de la pratique médicale.

L’Hôtel-Dieu fut vivement touché par la seconde guerre mondiale. Le 4 septembre 1944, des tirs entre miliciens cachés sous le dôme et les FFI (Forces Françaises de l’Intérieur) provoquèrent un grave incendie. Il ne resta du dôme que son entablement de pierre.

Le Dôme a été reconstruit à la fin des années 1960, en suivant cette fois-ci les plans de l’architecte Soufflot. La charpente de bois a été remplacée par une double coque en béton armé.

En 2010, les Hospices Civiles de Lyon décidèrent de fermer l’Hôtel Dieu qui ne pouvait répondre à leur politique de modernisation. Les Hospices Civiles, en collaboration avec la ville et le Grand Lyon se sont mis d’accord sur un programme de rénovation complète du bâtiment ainsi que sur sa nouvelle fonction.



LA CITE INTERNATIONALE DE LA GASTRONOMIE ET L'EXPOSITION PERMANENTE


La Cité propose des espaces d’expositions permanents et temporaires répartis dans le Dôme des Quatre-Rangs sur trois niveaux, une des parties les plus anciennes de l’Hôtel-Dieu.

Pour commencer votre exploration de la Cité de la Gastronomie, vous entrez dans le premier niveau qui vous permet d’admirer une œuvre d’art contemporain suspendue sous le Dôme des Quatre Rangs. C’est une sculpture de l’artiste Vincent Breed qui s’intitule Faithfood ou les usages du Monde. Elle est composée de 13 cuillères, de taille humaine. Ces objets font références à la fois à la cuisine car la cuillère est l’outil qui permet de nourrir l’homme mais aussi le malade et ainsi de combattre la maladie. La cuillère est l’objet qui permettait d’administrer le remède. En élévation dans le Dôme, comme Vincent Breed l’écrit sur son site internet, les cuillères « rappellent à la fois l’aide qu’apportait l’élévation spirituelle du lieu associée à l’efficace aspiration des miasmes par cette architecture visionnaire ». Le verre est le matériau principal de cette œuvre. Il se mélange parfaitement à cette architecture de pierre et permet de jouer avec la lumière. Vincent Breed explique que les cuillères sont « au nombre de treize pour célébrer ce taux de guérison à l’époque sur quatorze patients, alors que Paris n’affichait que un sur quatre ». Un détail doit attirer votre attention lors de votre visite : sur les cuillères sont gravés de profils dont sept sont féminins pour rendre hommage aux hospitalières de l’institution. Pour en savoir plus sur cet artiste et son savoir-faire, rendez-vous sur son site internet : https://www.vincent-breed.com/


Vincent Breed, Faithfood ou les usages du monde, Dôme des Quatre rangs, ©Mathilde Rondeau


Le premier niveau est consacré à l’exposition permanente. La métropole de Lyon, en tant que maître d’ouvrage a choisi de confier l’élaboration de l’exposition au musée des Confluences de Lyon, ce dernier étant le plus fréquenté de la région. Le but premier de cette exposition est de montrer aux visiteurs qu’en cultivant leur potager, en cuisinant eux-mêmes leurs produits, en savourant un bon repas fait maison et en le partageant, cela aura une influence sur leur santé et leur permettra de mieux manger. Alors qu’il faut repenser notre alimentation, la manière de produire la nourriture et de la cuisiner, les questions d’ordres culinaires, gustatives et de santé sont plus que jamais à l’ordre du jour. L’exposition est répartie sur les quatre rangs autour de l’autel situé sous le dôme.

Dans le premier rang du Dôme, le premier espace s’intitule « Bon appétit ». Il vous propose de vous immerger dans l’histoire culinaire de la ville de Lyon, d’en apprendre davantage sur les grands chefs lyonnais tels que Paul Bocuse et notamment d’admirer son prestigieux piano de cuisine. Cet espace vous permettra de découvrir l’histoire authentique des Mères lyonnaises et d’en apprendre plus sur les fameux bouchons lyonnais. Vous découvrirez toutes les subtilités de la cuisine lyonnaise à travers anecdotes et recettes célèbres de la région.


Espace « Bon appétit », ©Mathilde Rondeau


Un deuxième espace, « Au grand Hôtel-Dieu » aborde quant à lui l’histoire de l’Hôtel-Dieu depuis le 12e siècle. Entourés par la très belle apothicairerie datant du 18e siècle, ouvrages, plans et documents d’archives vous plongent dans l’histoire de ce lieu emblématique. Vous connaîtrez l’histoire de la médecine qui a pris place dans ces quatre rangs, vous en apprendrez plus sur la venue de François Rabelais et vous connaîtrez les dessous de la construction de cet incroyable bâtiment.

L’espace « Et demain ? », en continuité avec l’espace précédent vous propose de vous interroger sur la gastronomie de demain et également sur l’agriculture durable et les nouvelles pratiques alimentaires. Journaux, tablettes et interviews d’experts sont à votre disposition dans une salle conviviale décorée de tableaux ayant pour thématique la gastronomie prêtés par les différents musées lyonnais. Cet espace vous conduit enfin à la petite apothicairerie, espace poétique mêlant nature, cuisine et santé.


La petite apothicairerie, ©Mathilde Rondeau


Dans un autre rang, l’espace « À table » vous invite à déambuler à travers les halles et les étales d’un marché pour découvrir les produits fétiches des terroirs lyonnais, leur histoire et les recettes dans lesquelles on peut les retrouver. Une carte des terroirs de la région Rhône-Alpes vous permet d’identifier des produits régionaux bien connus et de situer leur origine géographique. C’est en découvrant cette partie de l’exposition que l’appellation « Capitale de la gastronomie » accordée à la ville de Lyon prend tout son sens. On comprend la richesse gastronomique présente dans les différents terroirs. Vous en apprendrez plus sur la « commensalité » et sur ce qui caractérise le repas des français illustré notamment par des scènes du cinéma français. A l’issue de ce parcours, on comprend que le repas n’est pas uniquement un moment pour se rassasier mais que c’est aussi une manière de créer du lien social autour du partage d’un repas.


Espace « A table », les Halles, ©Mathilde Rondeau



Espace « A table », le Marché, ©Mathilde Rondeau


Au deuxième niveau, l’espace « Miam Miam ! » est dédié à une exposition spécialement conçue pour les enfants. Ils peuvent ainsi déambuler autour d’un panier et d’une brique de lait géante. Des vidéos ludiques et pédagogiques sont proposées aux enfants pour en apprendre plus sur la provenance des produits qu’ils consomment. Tous les sens sont mobilisés pour permettre aux enfants de s’informer sur les liens entre bonne cuisine et santé.


Espace « Miam Miam ! », ©Mathilde Rondeau


Espace « Miam Miam ! », la bouche géante, ©Mathilde Rondeau


Enfin, le troisième niveau de la Cité est dédié à une cuisine et à un espace de dégustation mis à la disposition des cuisiniers en résidence qui auront l’occasion de cuisiner et de faire goûter aux visiteurs des plats élaborés à partir de thèmes précis. Des expositions temporaires sont organisées plusieurs fois par an pour mettre en lumière des spécialités culinaires, des terroirs et des pratiques alimentaires propres à certains pays. Le premier pays invité par la Cité de la Gastronomie est le Japon.


La Cité apporte nouveauté et vent de fraîcheur au monde culturel lyonnais. Rendre hommage aux pratiques culinaires lyonnaises, aborder des thèmes plus importants comme l’agriculture durable, les enjeux écologiques et l’évolution du repas partagé dans le monde, comprendre pourquoi Lyon est la « capitale de la gastronomie » et donner l’envie à nos enfants de mieux manger : voilà le rôle que s’est donnée la Cité. Chaque zone offre une atmosphère différente et exploite tous les sens des visiteurs. Les grands espaces offrent une déambulation optimale pour s’immerger pleinement dans l’univers de la gastronomie.








[1] C’est en 1935 que le chef Curnonsky donna à la ville de Lyon le titre de « capitale mondiale de la gastronomie ».

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