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Photo du rédacteurSoria Troisfontaine

Déjouer le vrai du faux… au Musée de la Contrefaçon.

Imaginez un endroit où le tabou du faux n’existe pas, où des objets authentiques et contrefaits vivent côte à côte. Qualifié d’insolite, pédagogique, ludique, inquiétant, étonnant, tel est le Musée de la Contrefaçon situé à Paris, l’unique musée en France exposant fièrement des faux. Quels sont les enjeux de ce type de musée ? Comment se fait-il qu’un tel musée promouvant le faux existe ?



La création du musée et la lutte anti-contrefaçon.

Créé en 1951 à l’initiative de Gaston-Louis Vuitton, petit-fils du fondateur de la marque de sac de luxe et président de l’Union des fabricants (UNIFAB), pour sensibiliser les entreprises à la contrefaçon. Le musée prend place dans les murs du siège de l’UNIFAB. Il s’agit d’une association française créée en 1872 regroupant 200 entreprises issues de l’innovation, de la tradition et de la création, et des plus grandes fédérations professionnelles. En 1877, l’association est reconnue comme étant d’utilité publique. Elle lutte contre le faux en promouvant et protégeant le droit de la propriété intellectuelle. Elle est placée sous tutelle du ministère de l’Économie, des Finances et de l’Industrie et du ministère de l’Intérieur. À l’origine, le musée était ouvert pour les professionnels, et c’est seulement en 1972 que le musée ouvre ses portes au public à l’occasion du centenaire de l’association.

L’Union des fabricants a quatre missions dans son programme que l’on retrouve sur leur site :

  • Agir : pour que la loi sur la propriété intellectuelle soit appliquée et collaborer avec la Commission européenne.

  • Sensibiliser : pour prendre conscience des conséquences sociales, économiques, commerciales, environnementales et criminelle de la contrefaçon. Elle organise des campagnes d’information sur son site internet.

  • Coopérer : avec les services publics (Douane, Police, Gendarmerie, DGCCRF, Justice).

  • Informer : les entreprises, fédérations professionnelles et spécialistes, tout secteurs d’activité confondus, lors de réunions et d’opérations liées à l’actualité juridique, législative et opérationnelle.


« L’UNIFAB promeut la défense des droits de la propriété intellectuelle, assure la synergie des forces compétentes pour lutter efficacement contre le faux et éduque le grand public pour freiner les achats de contrefaçons ». (L’UNIFAB, 2020)


La contrefaçon est une économie parallèle qui représente 3,3 % du commerce mondial (Chiffre OCDE). Les objets contrefaits sont partout, les objets de luxe et de la mode ont été les premiers à être visés, mais aujourd’hui la contrefaçon touche tous les objets de grande consommation. Cette expansion est due à plusieurs raisons, d’abord la capacité des fraudeurs à produire des faux à une échelle industrielle, mais aussi la multiplication des canaux de distribution. Le but de ce musée est de sensibiliser à ce phénomène en constante propagation et de mieux comprendre les conséquences de la contrefaçon en termes de sécurité, santé, environnement, droit social, etc.


La salle des saisies douanières © Musée de la Contrefaçon

Les collections

Souvenez-vous de plusieurs scandales autour de faux découverts dans des musées nationaux. En exemple, l’affaire au Château de Versailles qui avait de faux meubles XVIIIe s. dans ses collections. Ce genre de révélations entache la réputation des institutions. Quant à lui, le Musée de la Contrefaçon, se revendiquant être le seul, expose sans complexe des faux. Il s’agit principalement d’objets, très peu d’œuvres d’art. Pour pouvoir découvrir des œuvres d’art fausses dans un musée, il faudra se rendre au Museum of Art fakes (Fälschermuseum) à Vienne, qui expose des copies de tableaux et de gravures d’artiste connus.

Au sein de ses collections, le Musée de la Contrefaçon, présente principalement des objets de luxe et des objets du quotidien, que l’on peut répartir en différentes catégories : objets d’Arts décoratifs, joaillerie, jouets, objets courants, textiles… En tout, près de 500 objets sont exposés, allant de l’Antiquité jusqu’à nos jours, repartis en 6 salles sur 200m². En visitant ce musée, vous trouvez forcément un objet que vous avez eu entre les mains. Entre parfums, dictionnaires, logiciels, CD/DVD, outillage, électroménager, produits d’entretien, textile, maroquinerie, vaisselle, pièces détachées d’automobile, stylos, tabac, il y a de quoi ravir les plus curieux. Il s’agit d’une collection historique regroupant à la fois des modèles authentiques et des contrefaçons.



De plus, tous les objets exposés dans les vitrines du musée sont préalablement choisis par l’UNIFAB elle-même, toujours dans le but de proposer le plus large éventail d’objets pour mieux sensibiliser le public aux contrefaçons qui font partie intégrante de notre quotidien. Ces objets arrivent au musée à la suite de saisie faite par les Douanes, la Police ou la Gendarmerie. Finalement, ces objets sont le reflet de notre société. Ils représentent la propagation dans tous les domaines de la contrefaçon ainsi que l’évolution et les mutations de la lutte anti-contrefaçon désirées par l’UNIFAB.


Franck GENESTOUX, Façade du musée, 2021, photographie numérique © Ministère de la Culture (France), Médiathèque de l'architecture et du patrimoine, Diffusion RMN-GP
Façade du musée

Le bâtiment

Le musée se trouve dans un hôtel particulier au numéro 16 de la rue de la Faisanderie, dans le 16e arrondissement de Paris. À l’image de ce qu’il expose, cet hôtel particulier est une copie d’un hôtel du XVIIe siècle qui se trouvait à l’origine dans le quartier du Marais. En outre, l’argot « faisanderie » fait référence, en littérature, à une association d’escrocs et de voleurs, c’est notamment le cas dans Les Compagnons de l’Escopette de Victor Méric (MÉRIC, 1930, p. 203). Quoi de plus cocasse ! Cet hôtel fut détérioré durant la Seconde Guerre mondiale et fut remis en état par Gaston-Louis Vuitton en 1950. Il deviendra l’année suivante le siège social de l’UNIFAB et par la suite le musée.


La médiation

Le Musée de la Contrefaçon étant le seul musée français à proposer aux visiteurs des objets faux, il se doit d’avoir une médiation conformément aux valeurs de l’UNIFAB et de proposer une muséographie en accord avec son originalité. Pour ce faire, le musée invite le public à déjouer les méthodes des faussaires et à tenter d’identifier les vrais des faux objets au travers des collections permanentes et des expositions temporaires. Dès son ouverture au public en 1972, le Musée de la Contrefaçon fait en sorte que ses collections soient accessibles à tous, tant aux curieux, aux groupes scolaires qu’aux professionnels. Le service pédagogique du musée travaille ainsi à l’élaboration de plusieurs types de supports, adaptés aux différentes classes d’âge et aux programmes scolaires. La sensibilisation des publics, voulue par l’UNIFAB, passe aussi par la programmation culturelle du musée qui tente des nouvelles approches pour percevoir le vrai du faux. C’était le cas avec les expositions Authen’TIC TAC (2016-2017), dédié à l’histoire de l’horlogerie et Faux du logis (2011-2012), dédié aux objets contrefaits qui entrent dans le foyer. Ils ont une programmation aussi originale que le lieu, qui balaie tous les domaines où se trouvent du faux.



Pour les visites, le Musée de la Contrefaçon est ouvert du lundi au samedi de 14h00 à 17h00. Retrouvez toutes les informations sur leur site.



Bibliographie

Musée des Contrefaçon, Dossier de presse 2014 [Dossier de presse], mai 2014. URL : https://musee-contrefacon.com/wp-content/uploads/2013/09/dp-musc3a9e-de-la-contrefac3a7on.pdf

Union des fabricants, Dossier de presse 2020, [Dossier de presse] 2020. URL : https://www.unifab.com/wp-content/uploads/2020/10/dp-2020.pdf

Direction générale des douanes et droits indirects, Présentation du plan contrefaçons 2021-2022, [Dossier de presse], fév



Richard YUNG, « Le musée de la contrefaçon, en vrai et contre tous », Blog du président du CNAC [en ligne], mise en ligne le 16 février 2016, consulté le 16 décembre 2021. URL : http://www.blogpresidentcnac.fr/le-musee-de-la-contrefacon-en-vrai-et-contre-tous/


Victor MÉRIC, Les Compagnons de l’Escopette, Édition de l’Épi, Paris, 1930




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