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La Biennale de Gwangju en Corée du Sud : un catalyseur puissant de la création artistique contempora

Le nombre de foires et de biennales à l'échelle mondiale a ostensiblement augmenté depuis une cinquantaine d'années avec les Biennales de São Paulo, Sydney ou encore Dakar. Alors que de nombreux centres d'art voient le jour dans les grandes villes telles que Singapour et Hong Kong, ces métropoles deviennent les nouvelles plaques tournantes du marché de l'art. La Biennale de Gwangju prend place dans cette dynamique culturelle croissante en Asie. Créée en 1995, il s'agit de la première Biennale d'art contemporain d’Asie aussi bien du point du vue chronologique que quantitatif.

La Biennale de Gwangju se déroule dans un vaste Hall au cœur de la ville. Au-delà de cet espace toute la ville s'anime autour de l'évènement et les différents musées proposent également des expositions. Mais, contrairement à certaines manifestations qui la suivront, telle que la Asian Art Biennale crée en 2007, elle a choisi de ne pas exclusivement promouvoir la création asiatique. Elle se propose ainsi d'être un réseau pour les échanges culturels mondiaux tout en produisant un discours sur la création contemporaine et sur la mondialisation. Dès sa première édition en 1995 cette idée d'ouverture était présente avec le thème « Beyond the borders » (Au-delà des frontières). Dépasser les frontières territoriales mais aussi idéologiques, culturelles et évidemment artistiques était le véritable enjeu de cette édition.

Figure 1 : Hall d’exposition de la biennale Gwangju, photographie du le site officiel de la biennale https://gwangjubiennale.org

Une main tendue vers l'extérieur

Outre une ouverture vers l'extérieur par les thèmes proposés pour chaque édition, cette Biennale offre également un dialogue enrichi par les différents acteurs du monde de l'art contemporain. Le commissariat des diverses éditions a été confié à la fois à des conservateurs d'origine asiatique et à des personnalités internationales telles que Maria Lind conservatrice, critique d'art et directrice de la galerie ‘Tensta Konsthall’ de Stockholm ou encore Okwui Enwezor conservateur americano-nigerian, commissaire de la 56e Biennale de Venise ou de la Documenta 11. Cette ouverture au monde se manifeste également dans le logo officiel de la biennale qui symbolise un carré qui implose. Il évoque une volonté de sortir du cadre, de rompre avec les schémas traditionnels afin de s’interroger sur les fondements de l’art et sur son essence (voir figure 2). La Biennale souhaite repenser la nature de l’art sous le prisme de la création actuelle et mondiale, ainsi qu’encourager le public à voir le monde sous un autre angle dans une perspective d’ouverture. En outre, la biennale a établi un partenariat avec une centaine de galeries d'art dans le monde qu'elle rassemble lors de forums dédiés à la réflexion sur le rôle et le futur des galeries. Enfin, cette manifestation a accueilli en 2012 le premier forum des biennales mondiales qui avait pour ambition de réunir praticiens, critiques et commissaires de toutes les régions du monde afin d'échanger sur les sujets et les questionnements propres aux biennales mondiales.


Figure 2 : Logo officiel de la Biennale de Gwangju, disponible sur le site officiel de la biennale http://graemeevelyn.com/2016-gwangju-biennale-1-2-sept-2016-asia-culture-center-gwangju-south-korea/




La biennale et l'Asie ?


La biennale de Gwangju n'en n'oublie cependant pas son passé, ni les questionnements autour de l'identité de l'Asie. En effet, cette Biennale a été fondée comme un mémorial vivant du soulèvement du 18 mai 1980. Cette contestation organisée par des étudiants en faveur de la ‘Démocratie pour la Corée du Sud’ se transforma en un véritable massacre. De fait, cela a profondément marqué l'histoire de la ville et imprègne encore aujourd'hui la biennale au travers des thématiques des éditions mais aussi des œuvres présentées. La biennale tend par ailleurs à promouvoir l'art contemporain auprès de la population coréenne et plus particulièrement auprès de ses sections les plus jeunes. Par la mise en place de projets, de rencontres, de forum entre étudiants, commissaires, artistes, professionnels et citoyens de Gwangju peuvent alors délibérer ensemble sur l'essence de l'art, sur « que fait l'art ? », « que dit l'art ? », « pour qui ? » etc. La Biennale crée ainsi des liens entre les différents acteurs de la ville, liens qu'elle souhaite faire perdurer dans le temps.


La biennale comme outil politique ?


Ces divers éléments contemporains des expositions témoignent de l'intérêt politique d'un tel événement pour la ville de Gwangju et plus largement pour la Corée du Sud. Il permet un véritable rayonnement et un poids culturel non négligeable. Il a également permis au pays de s’émanciper des puissances auxquelles il a longtemps été soumis (Chine, Japon, dictature). La manifestation est en grande partie financée par la ville de Gwangju. Les organisateurs affirment qu’il n’existe aucun contrôle curatorial exercé par la ville ou l’État cependant nous pouvons en douter au vu d’un incident qui a fait scandale en 2014 avec la censure d’une œuvre critiquant la présidente du pays. Ce tableau du peintre sud-coréen Hong Seong-dam intitulé Sewol Owol représentait l’actuelle Présidente de Corée du sud Park Geun-hye en costume d’épouvantail maintenu par son père défunt et son chef d'état-major. Cette œuvre avait été créée en réponse au naufrage d’un Ferry en Avril 2014 ayant entraîné la mort de plusieurs centaines d’étudiants et face auquel le gouvernement avait minimisé les faits.


La Biennale de Gwangju s'est donc imposée comme un événement d'envergure à la fois tourné vers la création contemporaine mondiale mais également vers la création de l'Extrême-Orient. Devenue un évènement incontournable elle rivalise désormais avec des manifestations telles que la Documenta ou la Biennale de Venise. Elle propose une véritable interaction entre les créations des différentes aires géographiques mondiales, le tout au service d'une réflexion plus large sur l'art contemporain. Par ailleurs, son regard prospectif perceptible dans ses différents projets, témoigne de sa volonté de s'imposer comme un lieu incontournable de la création et des réflexions artistiques et esthétiques. Reconnue comme la plus grande biennale d'Asie, elle s'est donc installée comme un espace crucial dans le circuit des biennales internationales d'art contemporain, ce qui permet aujourd’hui à la ville de revêtir le statut de centre culturel majeur.

Pour finir nous pouvons mentionner la prochaine édition qui aura lieu de Septembre à Novembre 2018 et sera intitulé « Imagined Borders» . Elle reprendra le thème de la première édition autour des frontières avec cette fois-ci une réflexion autour des frontières imaginaires toujours en lien avec les questions de Mondialisation. Elle s’attachera à répondre à la question suivante : peut-on parler d'une ouverture des frontières dans le cadre de la mondialisation ou plutôt de nouvelles démarcations immatérielles ?


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