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Le Centre Pompidou aime le Japon

En 1986, le Centre Pompidou accueille la première exposition d’envergure sur l’art contemporain Japonais. 30 ans plus tard, l’antenne de Metz réitère l’expérience. Retour sur deux expositions marquantes pour l’art contemporain japonais en France.

Japon des avant-gardes 1910 - 1970

En 1986, Japon des avant-gardes 1910 - 1970, est l’une des grandes expositions du Centre Pompidou, tant par la diversité des œuvres présentées (plus de 500), que par sa fréquentation (plus de 153 000 visiteurs). Elle s’inscrit dans la lignée des grandes expositions pluridisciplinaires (Paris-Berlin, Paris-Moscou, Paris-New-York, Paris-Paris) puis des Magiciens de la Terre menées par le Centre entre 1978 et 1989. Pourquoi cette exposition eut-elle lieu en 1986 ? Les raisons sont multiples.


© Centre Pompidou 1986



Une raison diplomatique

D'un point de vue diplomatique et économique, les années 1980 sont marquées par de nombreux échanges entre France et Japon. Ce dernier est alors un partenaire économique admiré et redouté. Jack Lang, ministre de la culture, a donc souhaité intensifier les échanges culturels entre les deux pays.

En outre, un rapide coup d’œil sur le budget de l’exposition nous indique que la majeure partie des fonds (plus de 94%) provient de la Fondation du Japon, institution administrative fondée en 1972 par le gouvernement japonais. Celui-ci semble donc avoir ardemment désiré cette exposition. Sato Shoji, président de la Fondation, explicite les enjeux de la manifestation: « le souhait de la fondation du Japon est de casser l’image d’un Japon évoluant entre deux conceptions: celle d’un pays musée réduit à l’exotisme de ses traditions ou celle d’une superpuissance économique et technologique. »

Une volonté de réécrire l’histoire de l’art

Le but de cette exposition dirigée par un commissariat franco-japonais est d’être « la 1ère tentative de synthèse jamais entreprise sur les contributions du Japon à la culture moderne du XXe siècle ». Pourquoi cette revendication?


Tout d’abord, parce que l’art japonais du XXe siècle est alors très peu connu des Occidentaux. Alors que l’art traditionnel, qui a beaucoup marqué les artistes occidentaux à la fin du XIXe siècle, est présent dans les collections muséales européennes, les expositions consacrées à l’art contemporain de l’archipel sont rares et parcellaires.

En outre, dans les années 1980, le Centre Pompidou souhaite questionner l’histoire de l’art, présenter les mouvements, les personnalités aux origines de la modernité. Germain Viatte, alors commissaire général de la manifestation constate que «…rien n’a encore été fait pour donner largement la mesure des apports japonais à l’avant-garde internationale depuis le début du siècle . » L’équipe s’est néanmoins interrogée sur le bien fondé d’étudier la contribution du Japon aux avant-gardes, sur le risque « d’aborder un terrain dont les données nous sont inhabituelles sinon extérieures ?» Leur motivation réside dans la mutation culturelle en cours au Japon, mutation encore inconnue du monde occidental. Ils souhaitaient donc montrer, de façon historique et non thématique, les réponses du Japon au choc produit au XXe siècle avec la rencontre de la culture occidentale et réécrire l'histoire de l’art sous un angle transnational.


Cependant, en dépit des intentions, et même si cette exposition reste fondamentale, la présentation tendait avant tout à montrer l’influence des avant-gardes occidentales sur la modernité japonaise, et à présenter cette dernière comme un prolongement des recherches artistiques occidentales.

Une saison japonaise

© Centre Pompidou 2017

Près de 30 ans plus tard, le Centre Pompidou Metz organise Une saison japonaise (Centre Pompidou-Metz du 11 septembre 2017 au 14 mai 2018). Architecture et arts visuels sont ici présentés en deux expositions distinctes : Japan-ness pour l’architecture (du 09/09/17 au 08/01/18), Japanorama pour les arts visuels (du 20/10/17 au 05/03/18). Cette dernière nous délivre une vue d’ensemble, un panorama de la culture visuelle japonaise depuis 1970, date à laquelle le pays commence à affirmer sa propre identité culturelle en tant que nation. Il ne s’agit donc plus ici d’établir un rapport entre la création occidentale et la création japonaise mais de montrer sa particularité et sa place dans la mondialisation.


Dans cette optique, la scénographie n’est plus chronologique mais organisée par îlots thématiques autour de sujets clés, couvrant des aspects caractéristiques des arts visuels japonais. Afin d’approfondir l’analyse de chaque thème, certaines œuvres datant d’avant les années 1970 ont été incluses comme points de référence (notamment Clothespins Assert Churning Action du groupe High Red Center, ou La robe électrique de Atsuko Tanaka, membre du groupe Gutaï).Le but affiché de cette exposition est de montrer aux spectateurs la diversité et la variété de la culture japonaise et de démontrer que celle-ci n’est pas enfermée, réduite aux seuls concepts esthétiques «Zen»* et «kawaii»* .


Comme en 1986, la diplomatie joue un rôle important dans l’élaboration de l’exposition. En effet, La Saison japonaise précède le 160e anniversaire du Traité d'amitié et de commerce entre la France et le Japon. À cette occasion est programmée en 2018, “Japonismes 2018”, un projet de grande envergure qui verra une profusion de manifestations. Cette exposition constitue donc un avant-goût des grandes festivités.



pour consulter le détail de la programmation Japonisme 2018:

https://www.mcjp.fr/fr/la-mcjp/japonismes-2018




* L’esthétique zen se caractérise par la simplicité, la modestie, la modération, l’imperfection.


* Le terme Kawaii quant à lui signifie littéralement mignon. Il implique une esthétique très colorée, acidulée, kitsch, inspirée des mangas et dessins animés, caractérisée en outre par une absence d’engagement qu’il soit politique ou autre.





Sources:

Catalogue raisonné des expositions du Centre Pompidou, sous forme de plateforme participative, dernière mise à jour le 01/03/2017, http://catalogueexpositions.referata.com/wiki/Japon_des_avant-gardes. Consulté le 25/11/2017.


Collectif, Japon des avant-gardes 1910-1970, catalogue d’exposition (Paris, Centre Pompidou, 11/12/1986 au 02/03/1987), Paris, éditions du Centre Pompidou, 1986


Li Wei Xu, « Japon des avant-gardes 1919-1970 la réécriture de la modernité et la pluridisciplinarité des manifestations », Blog Histoire des expositions, Carnet de recherche du catalogue raisonné des expositions du Centre Pompidou, article mis en ligne le 12/09/2014, https://histoiredesexpos.hypotheses.org/1704. Consulté le 23/11/2017

Tags: Japon des avant-gardes Centre Pompidou histoire transnationale Une saison japonaise art contemporain japonais

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