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L’art et les nouvelles plateformes de communication numériques

Les nouvelles plateformes de communication renvoient à l’apparition d’internet au début des années 1980 et à la période appelée couramment l’ère numérique. Cette dernière se définit comme l’essor des techniques numériques dans les nations industrialisées, notamment par la création d’internet, réseau informatique permettant la communication entre utilisateurs via ordinateur accessible au plus grand nombre. Pour ce qui concerne l’art, cette révolution change les codes et usages habituels. Il y a une transition entre l’art fixe et une mobilité extrême et rapide limitée seulement par le matériel informatique et l’accès à internet. L’art qui auparavant était lié à un espace défini devient un flux parmi tant d’autres sur le réseau numérique. En d’autres termes, il passe d’un état statique et fixe à un art mobile. Il détourne les codes et usages des institutions pour être mis a disposition de tous dans un espace public. Cette mise à disposition directe remet en cause le système muséal tout en créant un lien direct entre l’artiste et les utilisateurs sans passer par des intermédiaires.


L’ART 2.0 ?


Ce processus permet à de nombreux artistes de rue de connaître une renommée internationale comme pour Biansky ou encore Dolk. Leurs œuvres sont connues par le grand public notamment grâce à de nombreux utilisateurs qui ont publié leurs graffitis sur des sites de partages et d’échanges. On peut même dire que leurs œuvres ont dépassé leurs créateurs car, pour le cas de Biansky, il y a peu de personnes qui connaissent sa véritable identité alors que son travail est reconnu et contemplé dans le monde entier.

Il y a une interaction directe entre l’œuvre et le spectateur qui peut, à sa guise, la modifier, la transformer, la détourner de son contexte originel. On peut penser aux nombreuses affiches caricaturales des élections politiques françaises ou encore américaines. C’est le cas notamment pour l’artiste Shepard Fairey, artiste graffeur américain, qui a crée l’une des affiches électorales de Barack Obama en 2008 le montrant avec des couleurs bleu, blanc et rouge et les slogans HOPE ainsi que YES WE CAN. Après l’affaire Snowden, l’affiche a été détournée par des internautes. En effet, le portrait s’est vu affublé d’un casque sur les oreilles et du slogan YES WE SCAN. Cet exemple nous montre qu’en fonction du contexte et de l’utilisateur, l’image peut être modifiée et réutilisée pour lui donner un nouveau sens et une nouvelle fonction. Ainsi s’instaure un renouvellement constant de l’image en fonction de l’interprétation que l’internaute souhaite lui donner.



Internet, un espace de liberté et de spontanéité

Les réseaux sociaux sont aussi un lieu d’anti-censure où les artistes sont libres de s’exprimer sur un désaccord ou une opinion divergente de la pensée commune. L’artiste russe, Vasily Slonov, s’est fait connaître sur la toile pour ses œuvres contre le système politique russe et l’organisation des jeux d’hivers de Sotchi en 2014. Les autorités russes de la région de Perm ont fermé à plusieurs reprises l’exposition intitulée « Welcome! Sotchi 2014 », où étaient présentes les œuvres de l’artiste, pendant le festival des « Nuits Blanches de Perm » du 13 au 23 Juin 2014. Suite à cette censure, l’artiste a décidé de diffuser directement ses œuvres via les réseaux sociaux pour protester contre cette privation de liberté. En quelques jours ses affiches sont devenues l’un des symboles de protestation contre la censure culturelle russe mais aussi contre les différents problèmes économiques et sociaux liées à l’organisation des jeux olympiques d’hiver.


Cependant, on voit aussi sur les plateformes de communication des comportements plus radicaux liés à une liberté d’expression totale. L’artiste russe Piotr Pavlenski est connu pour diffuser sur de nombreux réseaux sociaux ses performances violentes et polémiques. Ses actions, qui sont souvent des automutilations, dénoncent les privations de droits et de libertés par le gouvernement russe, mais aussi la suprématie des marchés boursiers en Occident. Par exemple, dans la nuit du dimanche au lundi 16 Octobre 2017, il met feu à l‘immeuble de la Banque de France situé Place de la Bastille à Paris. Une vidéo est publiée peu de temps après ainsi qu’un communiqué expliquant le geste de l’artiste. Cette performance a connu un écho important sur les réseaux sociaux, on peut même de parler de « buzz médiatique ». Ces actions polémiques sont à la fois violentes par leurs contenus et polémiques par leurs sujets. L’artiste souhaite toucher un maximum de personnes en peu de temps sur les réseaux en les interpellant par leur contenu radical et controversé.


Une autre mutation de la pratique artistique réside dans l’aspect spontané de l’art sur les plateformes de communications car un artiste peut répondre ou réagir rapidement en fonction d’une situation particulière ou d’un événement ponctuel. L’œuvre devient ainsi une réponse immédiate et s’inscrit dans une situation, puis devient obsolète ou perd son sens peu de temps après l’événement ou la situation passée. Apres les attentats du 13 Novembre 2015 à Paris, beaucoup d’illustrateurs ont manifesté leur soutien par les réseaux avec des dessins spontanés. L’artiste Jean Jullien a réalisé l’œuvre au succès international intitulée Pray for Paris qui figure l’alliance entre la tour Eiffel et le symbole peace and love. L’œuvre en question a été réalisée peu de temps après les attentats alors que l’artiste regardait les chaînes d’informations. Il s’agit donc d’une réponse directe et spontanée à un événement précis qui marque le dessinateur. Lors d’une interview donnée pour GQ Magazine, il déclara que : « Les réseaux sociaux font partie des mœurs maintenant, le fait de s'exprimer en ligne, en instantané, est une chose positive dans ce genre de cas. Ça permet de ne pas rester silencieux et de montrer qu'on est là. »1 Le dessin a été posté sur la plateforme Twitter et a connu un rapide succès puisqu’il a été reposté 50.000 fois en seulement quelques heures.


L’art sur les nouvelles plateformes numériques est un flux constant à diffusion mondiale permettant aux utilisateurs de consulter, d’échanger mais aussi de s’approprier l’œuvre. Il est mobile et spontané, le spectateur peut directement interagir avec lui. Cependant, l’œuvre numérique connaît également certaines limites liées aux nouvelles plateformes de communications, comme l’absence de matière ou la sensation de toucher. On peut supposer que l’apparition de casques et dispositifs de réalité virtuelle vont permettre de dépasser ce stade et de matérialiser des œuvres en 3D directement chez soi. Cela pose comme question le rôle et les enjeux des institutions traditionnelles que sont les musées ou les expositions.


Pierre-Henri Claveau

Note

1. Interview réalisée par Gonzague Dupleix, GQ Magazine, 16 Novembre 2015, section Pop Culture/Médias.

URL: http://www.gqmagazine.fr/pop-culture/medias/articles/jean-jullien-interview-de-l-artiste-derriere-le-symbole-de-paix-de-paris/29758. Consulté le : 12/12/2017.

Liens Photos et vidéos

Figure 1 : Gerd Altmann, Icons, Aout 2018

URL : https://pixabay.com/photo-2486501/

Piotr Pavlenski, Banque de France, vidéo diffusée par Euronews, ajouté le 16 octobre 2017

Lien Youtube : https://youtu.be/nNxSqeGSB9w

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